Miroir

De La Librairie Thermographique
Version du 27 septembre 2013 à 14:51 par Hcrepin (discuter | contributions)

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Sommaire

Miroirs, la thermographie spéculaire

Description

Les miroirs sont des objets destinés à refléter les scènes, objets ou lumière. On les utilise pour s'observer soi-même, agrandir l'espace ou visualiser des scènes derrières des parois ou des coins.

À l'origine, les miroirs étaient probablement des plans d'eau calme puis l'on utilisa des pierres polies, puis des métaux polis et, enfin une lame de verre garnie d'une couche de métal, cette dernière technique daterait d'un Ier siècle après J.C. aux verreries de Sidon.

Nos miroirs actuels qui sont des plaques de verres recouvertes d'un tain constitué d'une fine couche d'argent déposé grâce à la réduction du nitrate d'argent est due à Justus von Liebig en 1835 mais qui est désormais remplacé par un dépôt d'aluminium sous vide ou par dépôt électrolytique, moins cher et qui s'oxyde beaucoup moins (les anciens miroirs se reconnaissent car après un temps, ils se piquent de tâches noires d'oxyde d'argent) mais cette technique moderne oblige néanmoins à compléter par un tain de cuivre ou de plomb pour l'opacité (l'aluminium étant quasiment transparent à cette épaisseur mais un réfléchissant efficace néanmoins). L'efficacité des miroirs modernes standards tournent aux alentours de 80% de réflexion. [1]

La thermographie d'un miroir permet de voir si il y a des sources de chaleur derrière un coin ou une arête, de se thermographier soi-même ou de thermographier des zones dangereuses par réflexion.

Attention, le miroir ne va pas retransmettre l'intégralité du signal thermique, il va en absorber et en diffuser une partie comme montré ci-dessous:

Thermographie de corps humains d'adulte et d'enfant dans un miroir

Observons cette thermographie et il faut constater que les températures entre le réfléchi et le direct varient beaucoup. À noter aussi que les zones capillaires ne sont pas des références car leurs valeurs thermiques sont trop aléatoires selon la densité des mèches et l'angle d'observation. Par contre le front et le cou sont des bonnes références, le front étant généralement à 34-36°C et le cou également.

Étude de cas simple

Observons maintenant une deuxième image, en gros plan cette fois du visage:

Thermographie directe et réfléchie dans un miroir d'un garçonnet, corps humain

Dans ce cas, la symétrie du visage nous donne les valeurs directes et indirectes.

Utiliser un miroir pour une thermographie est donc délicat car il faut calculer soigneusement l'amortissement thermique, généralement d'ailleurs, on utilisera plutôt des miroirs de cuivres ou de plaqué or qui rendent beaucoup mieux que les miroirs classiques en verre[2]. D'autant que l'on observe dans cette image une pixellisation importante de l'image et donc une perte de détail que les miroirs métalliques génèrent moins, la réflexion étant directe et pas passant à travers une lame de verre qui aura tendance à légèrement diffuser le rayonnement.

En thermographie, l'on va dire que l'on utilise les propriétés spéculaires du verre, le terme de brillant y est banni, des objets mats à la vue peuvent d'ailleurs être parfaitement spéculaires en vue thermographique. N'oublions pas non plus que le miroir va absorber et diffuser une partie du signal thermique d'où la dégradation de qualité observée à la réflexion[3].

L'amortissement thermique observé dans cette image est faible, de l'ordre de 13°C. Faible? Oui, parce qu'en réalité, la thermographie fonctionne en degrés Kelvin, avec un zéro au zéro absolu théorique: -273.16°C. L'amortissement dans cette image est donc de seulement de l'ordre de 4,4%. Une thermographie directe ayant montré le front et le cou à environ 36°C soit 309.16 K. On peut donc dire que le miroir est un excellent réfléchissant en thermographie, le bémol étant que la plage de température des objets observés est faible et induit donc un erreur importante. Il faut donc retenir que l'utilisation de miroir présuppose généralement l'observation d'objets avec un fort contraste thermique pour limiter l'erreur de mesure rajoutée par le miroir.

La deuxième thermographie permet d'être plus précis, il y a 8.8°C de différence entre les joues et 12.7°C entre le cou et 12.6°C, ... Mettons cela en tableau:

Tableau comparatif en thermographie des températures directes et réfléchies dans un miroir

Ce que nous montre tout d'abord ce tableau, c'est que la caméra thermographique utilisée ici n'est probablement pas assez précise et le corps humain avec trop peu de contraste et de stabilité pour la situation.

Malgré ces imperfections, une droite se dessine et, curieusement, rien avoir avec une proportion d'avec les degrés Kelvin mais bien une règle de trois ayant pour centre de symétrie, une température aux alentours de 19°C, température qui est celle du miroir. La référence de déformation du signal thermique est donc bien le miroir lui-même qui amortit en fonction de sa propre température.

La solution pour améliorer la qualité de la réflexion, sauf quand il faut justement diminuer la température observée parce que dépassant les capacités de la caméra, serait donc d'amener la température du miroir dans la même plage thermique que l'objet à observer mais ceci signifie aussi qu'un miroir peut être utilisé pour amortir les températures observées d'un objet qui dépasserait les capacités de la caméra.

Cependant, ce type de technique rend illusoire la précision et va souvent cantonner à ne donner qu'une analyse quantitative sauf excellent matériel bien étalonné (miroir comme caméra) et utilisateur chevronné.

Cependant, le cas du miroir est relativement simple car son émissivité est de 0.97 et celle de la peau humaine 0.98, cela simplifie donc en évitant la superposition d'autres phénomènes.

Sauf que le cas suivant va nous démontrer que la mesure de référence est bien le Kelvin,l'échantillon pris ici était trop petit et avec trop peu de valeurs.

Étude d'un cas avec une gamme de température plus large et homogène

Maintenant, élargissons le spectre de l'expérience en portant sur près de 120°C de plage thermique(ce qui est 60% du spectre analysable par la caméra thermique utilisée ici):

Thermographie d'une lame de verre chauffée et de son reflet, analyse spéculaire

La thermographie proposée ici est celle d'une lame de verre autour de laquelle on a enroulé un fil d'acier et chauffée à la bougie donc dépassant largement les 150°C en certains points.

Vous noterez rapidement que la température du miroir dans l'interface entre la lame de verre et son reflet, vus en thermographie, est plus chaude que le reste du miroir, il est contaminé par le rayonnement jusque 2°C au point le plus chaud (qui n'apparaît pas ici et globalement de minimum 1°C plus chaud.

Nous avons ici 8 couples de mesures, ce qui est assez que pour échantillonner un graphe néanmoins, la précision de la caméra s'avère insuffisante pour un exercice rigoureux, il ne s'agit que d'une approximation.

Primo, comparons le rapport T° en direct et T° réfléchie, il semble évident qu'il faut passer en degrés Kelvin mais le zoom est un peu décevant car les températures ne sont pas des échantillons raisonnés mais des valeurs brutes prises en des points identifiables. Néanmoins, une droite semble se suggérer.

Facteur conversion reflet thermographie.jpg

En reprenant les valeurs utilisées par le graphe et en leur appliquant des méthodes d’agrégation statistique, nous semblons arriver à l'équation d'une droite classique de type T° direct = a x T° réfléchie + b.

Si l'on applique cette formule aux valeurs de température réfléchie, voici en graphe le résultat en utilisant la formule: T° direct=4,85*T° réfléchie -1135,43 K (en degrés Kelvin)

Tableau conversion reflet.jpg


Reflet du dispositif de chauffage dans le même miroir

Cette formule sans être précise épouse cependant relativement bien la courbe des valeurs mesurées, c'est après 125°C que l'on voit que les résultats filent. Ce qui est normal, cette caméra mesurant entre -20°C et +120°C, les valeurs par après sont indicatives et comme dans les limites, faussées.

C'est intéressant car permettant de vérifier sur des zones saturées de l'image car à au moins 120°C voire plus. Les points 17 et 18 saturent la caméra dans l'image réelle mais sont observables en vision réfléchie: 17 vaut 69,8°C ce qui équivaudrait à 255°C et 18 vaut 61.5°C ce qui équivaudrait à 214,5°C.

Attention cependant que la marge d'erreur atteint à peu près 8°C ce qui est énorme, ce n'est donc qu'une approximation même si en degré Kelvin, à ces températures, cela ne fait plus que 1,6 à 2%, le matériel de prise de mesure et expérimental manquaient également de précision mais c'est un bon exemple pour démontrer que jouer avec cela demande une très grande dextérité.

Voyons maintenant si cela marche avec la thermographie du visage qui utilisait le même miroir, avec des angles similaires mais pas aux mêmes distances: 21,2°C devient 19.05°C, 20,8°C devient 17,11°C et 21,4°C devient 20,02°C donc zéro pointé pour la transposition.

La méthode appliquée à la thermographie d'une flamme chauffant la lame de verre donne des valeurs réfléchies jusqu'à 140°C donc de l'ordre de 600°C en direct ce qui est bien compatible avec des températures de flamme centrale allant jusque 1500°C pour une bougie, selon sa composition. [4] (voir image ci-contre)

Notez également que la thermacam ici utilisée est un modèle standard longues ondes infrarouges qui n'est pas dédié aux gaz. Les flammes sont donc systématiquement sous-estimées voire invisibles car uniquement visualisées par les suies et les vapeurs qui rayonnent en leur sein. La mesure de flamme est donc strictement anecdotique.

La mesure de la lame de verre entortillée d'un fil d'acier est plus précise également car l'objet réel et son reflet sont d'une taille proche. Or, bien souvent le reflet est beaucoup plus petit que l'original or il est démontré que la précision de la thermographie est lié à la densité de pixel de l'image: Distance et thermographie. Donc l'imprécision liée à la diffusion va encore être augmenté par une diminution du nombre de pixels de l'image thermique. Plus encore la difficulté d'avoir la netteté sur l'original et sur son reflet lors de la calibration, bien souvent on devra faire deux prises de vues avec la netteté sur l'un puis sur l'autre ce qui permet aussi de régler le gain sur chacun de manière plus appropriée.

Et pour les objets plus froids que le miroir?

Et bien la conversion par une droite semble toujours de mise, les reflets sont plus chauds que les originaux, la preuve en image:

Thermographie des reflets et des originaux d'une collection d'objets


L'objet froid thermographié est de la glace, voir l'article glaçon pour comprendre comment de l'eau solide peut afficher une température positive même après correction.


Conclusions

La marge d'erreur à utiliser des miroirs en thermographie peut être très grande et n'est pas transposable d'un cas à l'autre, chaque cas demande une recalibration.

Utiliser les miroirs en thermographie demande un bon matériel bien étalonné et un opérateur extrêmement expérimenté.

L'amortissement du reflet dans un miroir est bien une règle linéaire.

Si l'on désire utiliser cette technique à titre scientifique ou professionnel, les réflecteurs en métal sont à conseiller car ils diffusent beaucoup moins le rayonnement ce qui diminue l'amortissement et le taux d'erreur. Attention, ils doivent néanmoins est régulièrement polis pour conserver leurs propriétés.

Se souvenir aussi que le reflet est toujours plus petit et plus lointain que l'original, il y a donc là une marge d'erreur complémentaire dont il faut tenir compte.

Pour achever, il semble opportun de rappeler que la racine de spéculaire vient du latin specularis (transparent, en miroir) mais est aussi proche du latin speculor observer et qui a donné le verbe français spéculer, méditer sur une matière ce qui semble bien le cas de cette partie de la discipline.

Exemple de reflet avec une façade en zinc

Exemple d'effet miroir en thermographie sur une façade en zinc

Le zinc n'est pourtant pas très longtemps brillant à la vue quand il est mis en oeuvre mais la thermographie ci-dessus montre son efficacité spéculaire assez ... spectaculaire ... Observé la faible perte thermique de l'image et que sans la photo réelle et l'expérience du thermographique, le rapport pourrait rapidement tourner à la catastrophe avec une mauvaise perception de la situation. la partie tiers gauche est uniquement le reflet des 2/3 partie droite.



Voir aussi

Reflets

English: mirror

Nederlands: spiegel

Références

  1. Wikipédia, miroir
  2. Cours ITC de niveau I
  3. La thermographie du bâtiment, Dominique PAJANI, Eyrolles 2012, pp50-54
  4. Bougie, Wikipédia
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